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Biographie

Nathalie Contenay

Diplômée de l'École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris en 1992 et après un parcours tourné essentiellement vers la sculpture et l'installation, la photographie s'est rapidement imposée comme la matière centrale de la pratique de Nathalie Contenay. Elle a ainsi développé une recherche singulière et hybride, au confluant de la photographie et de la sculpture, ouvrant la voie à la « photographie installée ». Son travail a été exposé régulièrement en France et à l’étranger dans différentes institutions - centre d'art, Musées,  et centres culturels, ainsi que dans plusieurs galeries qui l'ont soutenue et accompagnée au fil des années. Parallèlement, elle a contribué en tant que sculptrice et conceptrice à de nombreux projets scénographiques, tant pour les musées que pour le théâtre. Tout au long de ces années, elle n'a cessé de transmettre avec bonheur sa passion de l'art  auprès de divers publics. Agrégée d'arts plastiques, elle enseigne depuis dix ans les arts plastiques à l'Université d'Aix-Marseille, tout en partageant régulièrement ses recherches sous forme d'interventions et workshops ou dans le cadre de résidences d'artistes.

À propos

Dans le Timée, Platon décrit le temps comme étant « l’image mobile de l’immobile Éternité » ; une définition qui pourrait s'appliquer à la photographie. Celle-ci, en tant que manifestation radicale de l'Instant peut aussi, dans sa finalité même, devenir un pur objet d'étude, un phénomène propre à interroger et expérimenter la durée.  Aussi, afin de traiter de la question du temps et des possibles morphologies de son écoulement, je me consacre désormais à donner corps aux photographies afin de ranimer et libérer, s'il se peut, ces instants fantômes qui « palpitent » sous les surfaces impénétrables des clichés. La tentation d'imaginer pouvoir agir sur le temps lui-même, voire infléchir sa course est grande et le rêve prométhéen n'est jamais loin. Aussi, j'interviens désormais sur les surfaces mêmes des photographies, « (…) en tant qu’elles sont affectées par la durée(...) ». Je démembre les photographies, j'en détache méticuleusement les différents plans avant de, remontant l'ensemble, laisser cette fois-ci un jour entre les strates successives. Et c'est ici que tout se joue : l'immission de cette troisième dimension au cœur de ces espacements, aussi infimes soient-ils. 

Ces intervalles, que je nomme aussi diastèmes, ces vides qui séparent et unissent à la fois, dérèglent et dénaturent l'objet photographique qui d'absolument plan se retrouve multidimensionnel. Ravivés et réactivés, les figures et objets retrouvent une certaine corporalité et, comme libérés du corset de l'instant, se dilatent. Les architectures intérieures et extérieures jouent la réversibilité en un jeu équivoque d'imbrications formelles dans lesquelles le regard se perd, tantôt glissant sur la surface photographique tantôt la pénétrant. 

Je travaille principalement trois variétés d'images : mes propres prises de vues, les tirages papiers collectionnés (achats, trouvailles fortuites, archives personnelles) et celles enfin que je glane sur internet ; des images généralement « en souffrance », comme ces bagages oubliés sur les quais de gares ou ces colis qui attendent d’être enfin réclamés. Ce sont essentiellement les photographies d'architecture et tout particulièrement les vues d’intérieurs, statiques par excellence, qui m'occupent.

Fascinée depuis toujours par la « vie des autres », j'aime à travers mes « fenêtres», le viseur de mon appareil photo, l'interface de mon écran ou des clichés que je collectionne, observer le monde. Mais ce sont surtout les traces de vie qui m'intéressent et j'aime tout particulièrement prendre en photo ces lieux de passages désertés que sont les chambres et couloirs d’hôtels, les salles de restaurant quittées, les halls et autres lieux paradoxaux de grand vide après le plein.

Texte initial envoyé pour le projet par Nathalie Contenay

LE REGARD DE...

Diplômée aux Beaux-Arts de Paris en 1992, Nathalie Contenay vit et travaille aujourd’hui à Marseille et enseigne à Aix-en-Provence. Son parcours est essentiellement tourné vers la sculpture et l’installation. Elle entretient un rapport particulier avec la photographie. Bien que bidimensionnelle, elle la bascule vers le volume, aboutissant à une forme de photo-installation. Nathalie Contenay a également participé à des projets de scénographie, notamment théâtrale. La photographie est une coupe spatio-temporelle plate, l’artiste cherche donc à lui redonner du volume, un corps, et à libérer les instants qui “palpitent” en son sein. C’est en imaginant pouvoir agir directement sur ce temps que lui est venu l’idée d’intervenir sur les surfaces même des photographies en les démembrant et en les remontant sur plusieurs plans — un jeu de montage et de collage. Nous avons choisi parmi ces photo-installation-collages, six œuvres de l’artiste que nous avons regroupées sous trois facettes du prisme Faire corps, la thématique de cette exposition collective.

Notre première sélection recoupe la série des Introspections et l'œuvre intitulée Impactes qui se référeraient à l’intimité et à la relation dehors et dedans, vide et plein. Introspection 1 & 2, des photographies montées sur pvc constituées de plusieurs couches, strates, plans. Elles regroupent des hommes, perturbés, qui nous invitent, de par leur regard, à entrer dans leur intimité. Ces invitations sont générées par diverses ouvertures dans leurs vêtements par lesquelles nous découvrons des paysages urbains colorisés, structurés et montés en plusieurs plans, un peu à la manière d’un diorama.

La série Impactes suit le même schéma. Nous y voyons par exemple un homme prostré, assis sur une chaise, dos à nous, laissant apparaître deux trous dans son t-shirt blanc. Dans ces derniers encore, deux dioramas urbains y sont repérables.  L’artiste tente de restaurer et de célébrer des extraits de “vies minuscules” au travers de ses œuvres, ce qui n’est pas sans rappeler Le Dormeur du Val d’Arthur Rimbaud. L’incorporation du monde urbain à l’intérieur même d'individus pourrait renvoyer à l’imprégnation du rythme de vie effréné qu’impose la ville. A l’instar des dormeurs du métro, ces œuvres témoignent d’un moment de répit et d’intimité figé dans le temps. Ces hommes usés s'abandonnent au sommeil qui les harcèle, chemises entrouvertes, laissant apparaître un corps ouvert, une peau stigmatisée. Ils font corps avec eux-mêmes, avec leurs rêves peut-être…? Notre regard tombe dans diverses intimités, nous sommes tels des voyeurs espionnant le voisinage.

Notre deuxième sélection s’articule autour de l’héritage artistique avec Piedras et The first one. Piedras est une photographie argentique en volume construite sur quatre plans dans lesquels nous pouvons observer un homme en jean vu du dessous, en contre plongée. The first one est une reproduction laser en plusieurs plans montée sur PVC dans laquelle nous pouvons voir une femme croisant les bras au dessus de sa tête, vue en plongée. Ces photographies et leurs collages illustrent une appartenance historique, un certain héritage iconographique. Elles font corps avec l’histoire de l’art, elles citent discrètement, humblement. The first one n’est pas sans nous rappeler, dans une inversion de point de vue (pieds/tête) le tableau d’Andrea Mantegna, Lamentation sur le Christ mort dont le raccourci est saisissant de perspective. Ou, pour reprendre la bonne orientation, comprendre avec la tête en premier plan, la fresque d’Andrea del Castagno, La Trinité et Saints, peut aussi réapparaître à la vue de The first one. Tout comme les travaux anatomiques de Léonard de Vinci d’ailleurs, jusqu’à la série Têtes — grand écart — de Patrick Tosani. En plus de donner corps aux images, Nathalie Contenay cherche à redonner vie aux corps eux-mêmes grâce au volume qu’induit le collage.

Ultime image de cette sélection, l'œuvre SOL. Il s’agit d’une installation de tirages argentiques contrecollés sur pvc, détourés, fixés individuellement au mur. Nous y retrouvons plusieurs personnages en action qui viennent d’univers et de cultures différentes. Nathalie Contenay travaille sur les relations entre plusieurs images qui se composent dans ses œuvres et qui ouvrent également sur de nouvelles lectures (un travail qui pourrait être mis en lien avec celui de Martina Sauter qui réalise aussi des collages d’images photographiques et cinématographiques) en créant sa propre mise en scène spatiale. SOL s’inscrit dans cette optique. Le mélange hétéroclite de plusieurs silhouettes, de plusieurs personnages différents ayant été délicatement détourés et remontés, offre alors une nouvelle image créée de toutes pièces, tout autant qu’une figure accomplie et libérée des lois de la gravité. 

Aussi, tous les personnages font corps puisqu’ils ne forment plus qu’un groupe qui est le sujet de cette œuvre.

Eliott Iribarne & Tom Boudrot

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